Pour les 80 ans du Front populaire et les 20 ans des Amis de l’Huma, un événement exceptionnel se déroulera au cinéma Max Linder, à Paris, en présence de très nombreux invités. De ceux qui luttèrent en 1936 à ceux qui luttent en 2016…
Les Amis de l’Humanité marqueront le 80e anniversaire du Front populaire avec des films sur des luttes ouvrières d’aujourd’hui, à Paris, le dimanche 1er mai prochain, entre 9 h 30 et 13 h 30, au cinéma Max Linder Panorama, en partenariat avec cette salle historique. Le rendez-vous précédera la manifestation syndicale de l’après-midi. D’autres rencontres sont prévues, à des dates diverses, par leurs comités locaux dans les régions.
Le 1er mai 1936 se situe entre les deux tours (26 avril–3 mai) des élections législatives victorieuses d’où sortira le gouvernement de Front populaire, et à la veille de la grève générale avec occupations d’usines qui débouchera sur la semaine de 40 heures, les premiers congés payés, la généralisation des conventions collectives, au terme des accords signés dans la nuit du 7 au 8 juin à l’hôtel Matignon par le patronat, la CGT et l’État. La remise en cause, aujourd’hui, de ce grand moment social de la gauche et de la France, au seul bénéfice de l’arbitraire patronal, contre les accords avec les syndicats et la loi, leur confère une brûlante actualité. Les deux films, en sortie ce printemps sur les écrans, et qui s’accompagnent de débats après leur projection, portent sur des combats d’actualité contre des fermetures d’usines. Ils sont marqués par une expression ouvrière spectaculaire. Françoise Davisse, réalisatrice deComme des lions (Les Films du Balibari), a filmé, « de l’intérieur », la grève de quatre années des travailleurs de PSA à Aulnay-sous-Bois. L’usine a fermé mais, comme le soulignent ses acteurs, reste une victoire de la conscience et de la solidarité, qui ressort de l’extrait que verra le public du Max Linder.
Dans1 336 jours, la victoire des Fralib (Pol’Art), Claude Hirsch a accompagné le combat des ouvriers de Gémenos qui, durant quatre ans, ont combattu la décision prise par la multinationale Unilever de fermer l’usine proche de Marseille. Jusqu’à la victoire de la création d’une coopérative ouvrière, Scop-TI (thé-infusion), qui a pris, à l’automne 2015, un nouveau départ. On en découvrira, au Max Linder, un montage inédit.
Saisir le fil du monde ouvrier
Les réalisateurs ont accepté, pour ce 1er Mai, de proposer ensemble, exceptionnellement, des séquences courtes, une heure au total, afin de favoriser le croisement de leurs expériences, de permettre un échange entre les ouvriers d’Aulnay et de Gémenos. Avec les premiers, seront présents Philippe Julien, du syndicat CGT, Salah Keltoumi, Agathe Martin, acteurs du film, et Ghislaine Tormos, ouvrière, pour son livre le Salaire de la vie. Pour les seconds : Olivier Leberquier, syndicaliste, directeur de la Scop, et Krim, participant au film. Ils retrouveront d’autres réalisateurs qui portent leurs regards, de différentes façons, sur le monde ouvrier : François Ruffin pour Merci patron ! et Claire Feinstein pour une chronique rare à la télévision (France 3 Régions), Nous, ouvriers (13 Productions). La noblesse revendiquée de ce document est incarnée par un ancien mineur, résistant à 16 ans, dirigeant de la CGT, Achille Blondeau, qui crève l’écran, et dont on entendra le témoignage. Cette rencontre de quatre cinéastes d’aujourd’hui, ayant saisi le fil du monde ouvrier, constituera un événement à lui tout seul. Pour les Amis de l’Huma, ce sera une façon de marquer leurs 20 ans d’existence. Le 1er mai 1996, beaucoup en ont gardé le souvenir, ils avaient réuni les dirigeants des cinq fédérations de cheminots, dont Bernard Thibault pour la CGT, après la grande grève de l’hiver précédent, avec des écrivains, des cinéastes, des journalistes, qui se sentaient concernés par le mouvement social. C’est dans le même esprit que les Amis de l’Huma préparent la rencontre du 1er mai prochain. Ils y inviteront des parrains qui, déjà, les accompagnent : Robert Guédiguian, Gérard Mordillat… Ou les rejoignent : Roland Gori, Philippe Torreton, Daniele Linhart. Le souci de l’Humanité sera du même coup au cœur de la rencontre. La situation périlleuse dans laquelle se trouve, aujourd’hui, le « journal fondé par Jean Jaurès » touche au plus vif, et au plus profond, le seul quotidien qui se fait acteur du mouvement social, particulièrement quand il occupe le devant de la scène, et qui ouvre largement ses colonnes aux points de vue progressistes et, plus généralement, à la pensée. L’alerte lancée par son directeur, Patrick Le Hyaric, redouble l’intérêt de se retrouver nombreux, un 1er Mai, dans la salle des grands boulevards parisiens. Tous ceux, salariés, syndicalistes, intellectuels, qui se reconnaissent dans l’intelligence et le courage des ouvriers d’Aulnay ou de Gémenos, sont chaleureusement invités au Max Linder. Ils y retrouveront des jeunes, aujourd’hui en mouvement, qui ont lancé ce cri : « On vaut mieux que ça ! »